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Le blog de nephret
Quelques poêmes, quelques réflexions, un peu journal intime et surtout partage des mots et des idées...

HISTOIRE D'HYDRASIL

nephret #Ecriture

hydrasil.jpg

 

 

HYDRASYL

 

Mon Ami

 

Autrefois, les arbres jouaient un grand rôle dans la vie des hommes.

Protecteurs, pourvoyant à presque tous leurs besoins, ils étaient aimés, respectés, considérés comme les manifestations de la présence des dieux et des fées.

On les honorait.

 

Qu’adviendra-t-il d’une civilisation qui les méprise, les détruits, d’une civilisation insensée qui a rompu ce lien primordial avec le vivant.

 

 

J’ai eu la chance de grandir parmi les amis des arbres, et d’être éveillée dans l’amour et le respect de la nature.

 

Je vais vous parler de mon grand amour avec <Hydrasil> mes <Hydrasil>, car ils sont au nombre de trois – autres mais toujours le même dans son unicité.

 

Au commencement… il y a eu Hydrasil 1er – l’arbre de Grand-père, patriarche géant - il mesurait plus de 2m -  et bienveillant - plein de tendresse de patience et d’humour – il avait construit de ses mains une immense maison pour y abriter ses quinze enfants et où, au fil des années, s’ébattait une joyeuse et turbulente troupes d’enfants, petits-enfants, neveux, nièces, cousins, cousines et amis, choyée par des aïeux aimants et patients. Grand-mère, petite souris grise et souriante, toujours affairées, aimante et gaie et Grand-père, détenteur de sagesse, de science et d’autorité ferme mais pleine d’amour.

 

Le jardin s’ouvrait sur une grande prairie jouxtant la propriété du Docteur Duvernoy, ami et  complice de la famille. Pour délimiter les deux territoires, un ruisseau et un vénérable tilleul.

Ce géant débonnaire nous servait d’ascenseur pour passer dans la jungle voisine soigneusement entretenue pas Emile, le jardinier, lui aussi confident et complice de nos jeux.

 

Du plus loin que je me souvienne, je revois la silhouette de ce tilleul majestueux. Emile m’avait rassurée quand du haut de mes quatre ans, je me lamentais sur la mort prochaine de l’arbre. En Octobre,  je me suis rendue compte qu’il perdait toutes ses feuilles.  Emile m’a expliqué qu’il se préparait pour l’hiver, et qu’au printemps il nous en donnerait de toutes neuves et porterait encore plein de fleurs et de fruits.


Il faut dire que, tout l’été, j’avais entretenu une étrange relation avec le tilleul. Un peu sauvage, la turbulence, l’exubérance et les cris de mes nombreux cousins me fatiguaient parfois, aussi j’avais pris l’habitude de me réfugier auprès de mon arbre et je m’allongeais entre ses racines, sur un lit de mousse,  pour y rêver en regardant bouger les branches et en admirant les jeux de lumière et de nuages, nourrissant ainsi inconsciemment mon besoin d’imaginaire.

 

Grand-père, qui surveillait la marmaille avec indulgence et fermeté, avait remarqué mon manège, et un après-midi, il vint s’asseoir près de moi, appuyé au tronc du tilleul. D’abord silencieux, il commença par promener sa main sur l’écorce en fredonnant. Intriguée, je le regardai.

-         Qu’est-ce que tu fais ?

-         Je parle avec mon ami.

-         Je peux aussi ?

-         Il faut le lui demander.

-         Comment ?

-         D’abord, il faut l’appeler par son nom, et puis, comme le Renard du Petit Prince, se laisser apprivoiser.

-         C’est quoi son nom ?

-         Avant tout, il faut que je te raconte l’histoire d’Yggdrasill.

 

Et c’est ainsi que Grand-père m’a fait pénétrer dans le monde magique des arbres.

Le grand frêne Yggdrasill, l’arbre originel, l’ancêtre de tous les arbres, relie les trois mondes.

Ses racines puissantes puisent profondément dans les entrailles de la terre.

Ses branches triomphantes s’élancent aux confins de l’univers.

Son tronc solide relie les deux mondes et abrite toute vie.

 

Fascinée, je buvais ses paroles. Ce jour-là, je me suis nourrie de rêve, de merveilleux.

 

Grand-père me donna rendez-vous au bout du jardin le lendemain à l’heure de la sieste. Et c’est ainsi que je commençais à m’apprivoiser.

Trop petite pour me souvenir du nom bizarre du vénérable ancêtre originel, seule la consonance <Idrasil> trottait dans ma mémoire (par la suite je l’écrirai Hydrasil).

 

         Tu te rappelles de son nom ?

         Hydrasil

Bien. Alors, nous allons nous avancer lentement vers le tilleul à travers la prairie. Regarde bien, écoute bien, respire bien, pense très fort à lui, et quand tu sentiras qu’il t’a vue, arrête-toi et appelle-le par son nom Ensuite, tu fais ce que tu dois faire.

 

Ma main calée dans la main rassurante de Grand-père, j’ai commencé mon voyage initiatique.

La silhouette du tilleul emplissait tout l’espace. Je le découvrais encore plus grand, plus imposant. En fait, je le voyais pour la première fois. Mes yeux ne pouvaient pas se rassasier, j’avais le souffle court.

         Respire bien.

Grand-père m’a expliqué comment et le calme s’est installé.

         Ecoute bien

J’ai commencé à percevoir le bruissement des feuilles, puis le craquement des branches et le déplacement de l’air. J’étais bercée de vibrations.

Nous avancions lentement et … je me suis arrêtée : j’ai compris viscéralement, intuitivement, qu’Hydrasil m’avait <vue>. Ce fut aussi perceptible que s’il m’avait <touchée>.

         J’ai simplement prononcé son nom.

                            -Hydrasil

Grand-père a lâché ma main et d’un effleurement il m’a poussée vers l’arbre, mais c’était inutile, j’étais aspirée, attirée. La distance qui nous séparait semblait infinie. Tous mes sens en éveil, j’avançais vers lui. Je le sentais vivre, vibrer,  rassurant.

J’ai fermé les yeux pour mieux le voir et l’écouter. Il m’a accueillie avec une douceur bienveillante. Quand mes mains se sont posée sur lui, deux grosses larmes silencieuses ont perlé. J’étais <chez moi>, j’étais <moi>, contre mon ami Hydrasil.

Je me suis sentie <vivante>.

 

Ce jour-là, un lien mystérieux s’est tissé entre le tilleul et moi, entre tous les tilleuls et moi. A ce moment là, je ne le savais pas. Tout au long de ma vie, un tilleul veillera sur moi, quel que soit l’endroit où j’irai.

 

Le tilleul de mon Grand-père fut le premier.

Il m’a vue grandir. Il a entendu mes premières confidences, consolé mes premiers chagrins.
Selon le même rituel, je m’avançais vers lui et m’arrêtais à distance respectueuse, attendant qu’il me voie, puis je m’approchais, heureuse et sereine, et je m’appuyais contre son troc avant de m’allonger entre ses deux plus grosses racines, la joue tout contre lui, et je lui parlais.

Je sentais ses vibrations m’envelopper, me protéger. Au fil des saisons, son énergie me ressourçait, m’apaisait, me consolait. Il m’a aidé à grandir.

 

Quand la maison de mes grands-parents a été vendue, je suis revenue souvent le voir en profitant de la complicité du bon docteur.

 

Hydrasil 1er a bercé mon enfance et mon adolescence, il m’a ouvert l’espace des elfes et des fées, donné une dimension de l’univers, projetée dans l’espace

 

Faites cette expérience : Allongez-vous perpendiculairement au pied d’un grand arbre. Placez votre tête contre le tronc et laissez votre regard suivre lentement la ligne du tronc, puis d’une branche maitresse, puis s’une branche secondaire, puis d’un rameau, et enfin de la pointe d’une feuille projetez-vous dans l’espace jusqu’au vertige. Vous avez l’impression d’être en apesanteur. Votre esprit est libéré de toute contrainte. Respirez lentement et sentez l’énergie de la terre et de l’arbre vous envahir.

 

Il m’a enseigné la patience, la valeur du silence, la joie de faire partie de la nature, la bénédiction de la vie, sa fragilité, sa force. Il m’a appris le partage, la méditation, la préciosité du moment présent.

 

Grand-père m’a fait un merveilleux cadeau : mon premier vrai ami, mon premier confident, une source inépuisable d’amour et d’énergie.

 

Ceci est l’histoire d’Hydrasil 1er

 

(à suivre)

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une très belle histoire et j'aurai bien besoin de trouver un arbre pour perdre mon anxiété
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